Le chancre bactérien de la tomate dû à la bactérie Clavibacter michiganensis fait partie des maladies les plus redoutées qui peuvent toucher les tomates. Plus ou moins présente en France selon les années, en particulier pour les cultures sous abri, cette infection peut provoquer la perte totale d’une récolte. Vous souhaitez apprendre à la reconnaître pour la différencier de pathologies voisines et la combattre efficacement ?
Voici comment lutter contre le chancre bactérien de la tomate.
Zoom sur le chancre bactérien de la tomate
Le chancre bactérien de la tomate se transmet facilement par des plants ou des graines infestés, mais aussi par les pratiques culturales, l’importance du pouvoir pathogène (pathogénicité) de cette bactérie à Gram positif semblant varier selon les souches en cause.
Bon à savoir : la coloration de Gram est une technique permettant de mettre en évidence certaines bactéries au microscope.
Description rapide
Le chancre bactérien peut être dû à une infection primaire systémique comme à une infection foliaire secondaire.
Infection primaire systémique
Ce sont tous les organes aériens de la tomate qui vont être touchés dans ce cas. Mais le délai entre une contamination systémique et l’apparition des premiers symptômes peut varier de 3 semaines à 3 mois selon les conditions climatiques de culture.
- Les premiers signes de présence du chancre bactérien sur un pied de tomate se traduisent par l’apparition de plages nécrosées sur des folioles qui ne se fanent que d’un côté avant de jaunir puis de brunir jusqu’à dessécher la moitié de la feuille atteinte.
- Le flétrissement s’étend ensuite plus ou moins rapidement à tout le plant contaminé : sur les tiges, les pédoncules des fruits et les pétioles des feuilles,apparaissent souvent des stries brunâtres allongées ou des petites pustules arrondies de 1 à 2 mm de diamètre, qui peuvent par forte chaleur humide évoluer en chancres ouverts d’où suinte un liquide bactérien blanchâtre.
Quant aux tomates portées par des pieds infectés, elles sont petites et tombent avant maturité. Leur surface encore verte est marquée par des petites taches blanchâtres, au centre proéminent qui brunit et s’entoure d’une limite jaune clair. Cet aspect caractéristique est souvent comparé à des « yeux d’oiseau ».
Contamination foliaire secondaire
Dans ce cas, des taches brun foncé ou noires bordées d’un fin liseré jaune sont visibles à la périphérie des folioles, lesquels s’enroulent parfois sur eux-mêmes vers leur pétiole.
Des taches en « œil d’oiseau » peuvent également apparaître sur les fruits.
Dégâts occasionnés par le chancre bactérien de la tomate
C’est surtout lors des infections primaires et de la fructification que les manifestations et conséquences de la maladie sont importantes. Les infections secondaires, elles, entraînent peu de dégâts pour la culture, surtout lorsqu’elles sont tardives.
Les tomates des plants fortement infectés :
- ont une taille inférieure à la normale ;
- sont plus ou moins décolorées ;
- tombent prématurément ;
- leurs graines peuvent également être infectées.
Le plus souvent, ce sont plusieurs plants successifs d’une même rangée qui sont touchés car la transmission se fait physiquement lors des opérations de culture (taille, puis récolte).
Sources d’inoculation
L’inoculation primaire de cette maladie est principalement due à la plantation de jeunes plants (ou de graines) déjà contaminés.
Bon à savoir : des contaminations latentes en pépinières peuvent ne se manifester que plus tard lors des cultures.
Cette bactérie pouvant survivre de 1 à 2 ans dans des tiges de tomate, des débris infectés présents sur une surface déjà cultivée sont une source potentielle d’inoculation pour de nouvelles cultures.
Bon à savoir : en revanche, cette bactérie ne survit pas à quelques jours sans support et à l’air libre.
Facteurs favorisant le développement du chancre bactérien de la tomate
Plusieurs conditions contribuent au développement de la maladie :
- une température environnante de 28 °C et une humidité relative d'environ 80 % ;
- un sol léger sablonneux et légèrement alcalin ;
- une forte densité de plantation limitant la pénétration lumineuse ;
- un arrosage par aspersion ;
- un apport excessif de fumure azotée qui accélère la croissance.
Quant à la dissémination, elle se fait à la suite des différents gestes culturaux : greffage en pépinière, transplantation, taille, effeuillage, irrigation, contacts avec les outils de culture.
Bon à savoir : la variété de cultivar, la virulence plus ou moins grande de la souche de bactérie présente, le type de culture (au jardin ou sous serre) ainsi que les conditions de culture influenceront la gravité ou nom de la maladie.
Espèces végétales concernées
La tomate est la principale plante hôte de cette bactérie. Toutefois, d’autres solanacées sauvages telles que la morelle noire (Solanum nigrum) peuvent également l’héberger sans intervention humaine.
Quant aux autres solanacées cultivées (poivron ou aubergine, par exemple), elles peuvent être contaminées, au stade plantule, par des pratiques culturales (outils non désinfectés, eaux d’arrosage contaminées…).
1. Prévenez une infection par le chancre bactérien de la tomate
Si votre terrain a été infesté l’année précédente, un certain nombre de mesures sont à appliquer pour prévenir l'apparition de la maladie :
- Pratiquez une rotation des cultures avec d’autres plantes qui ne sont pas des hôtes potentiels de cette bactérie.
- Si vous n'avez pas un autre emplacement permettant cette rotation de cultures, vous devez, avant la replantation, préparer soigneusement votre terrain pour éviter qu’il ne soit une source potentielle d’inoculum :
- en fin de saison, arrachez et brûlez tous les pieds de tomate restants ;
- puis éliminez soigneusement tous les restes de culture (débris de tiges, fruits, même séchés) et autres débris végétaux de la surface du sol à cultiver;
- après ce nettoyage soigneux, retournez le sol à la bêche ou au motoculteur, ce qui activera la décomposition des quelques débris restants et supprimera les chances de survie de la bactérie dans ceux restés éventuellement en surface.
- Enfin, replantez ou ressemez uniquement des plants ou des graines dont vous avez l’assurance qu’ils sont sains.
Bon à savoir : la recherche en vue de sélectionner des plants résistants à cette bactérie n’a pas encore, à ce jour, abouti à des produits commercialisables.
- Si vous ne pouvez pratiquer un long assolement d’au moins 3 ans, tentez de désinfecter votre sol. La solarisation du terrain, méthode naturelle dans les régions chaudes et à forte insolation, a ainsi démontré son efficacité.
2. Diagnostiquez la maladie du chancre bactérien de la tomate
La détection précoce des symptômes de la maladie du chancre bactérien de la tomate est déterminante pour en limiter l'extension et aboutir, parfois, à son éradication.
Devant des symptômes semblables à ceux décrits ci-dessus (flétrissement sur un côté des feuilles puis sur tout le plant, stries brunes, pustules laissant couler un liquide blanchâtre…), confortez votre diagnostic par l’observation :
- sur des tomates plus petites encore vertes, des taches en « yeux d’oiseaux », caractéristiques de cette maladie, sont visibles ; de 3 à 4 mm de diamètre, elles peuvent s’amalgamer si elles sont trop proches ;
- à un stade suffisamment avancé de la maladie, des coupes longitudinales effectuées sur des tiges, au point de jonction des pétioles, montrent par endroits un jaunissement ou un brunissement marqué des vaisseaux qui conduisent la sève, ainsi qu’un jaunissement des tissus qui leur sont accolés ; quant à la moelle, elle peut être soit brune, soit farineuse et sèche.
Conseils : ces symptômes sont toujours irréversibles, et l’arrachage d’un pied malade montre toujours un système racinaire sain ; aussi, veillez à ne pas les confondre avec ceux d’un stress hydrique, d’une alternariose (il n'y a pas les anneaux concentriques sombres caractéristiques de la flétrissure alternarienne), d’une tache septorienne (sur les taches des fruits, il n'y a pas présence de pycnides, même à la loupe).
3. Luttez contre le chancre bactérien de la tomate
Plusieurs méthodes permettent de lutter contre cette maladie bactérienne des tomates, dans un respect plus ou moins grand de l'environnement.
Traitements respectueux de l’environnement
Avant et pendant la culture, éliminez les mauvaises herbes au pied des plants de tomates et à proximité, surtout s'il s'agit de solanacées (comme la morelle noire).
Les traitements cupriques (bouillie bordelaise et autres…) ne sont plus efficaces lorsque la présence de bactéries a atteint un certain seuil. Toutefois, ils peuvent avoir une action préventive avant le développement de l’inoculum primaire.
Important : seules des mesures préventives et une intervention précoce dès l’observation des premiers symptômes peuvent permettre de limiter les dégâts.
Arrachez et brûlez ou chaulez les plants atteints, ainsi que ceux tout proches qui paraissent encore sains.
Autres traitements possibles
Un activateur de défenses naturelles, l’acibenzolar-S-méthyl (homologué en France), est utilisé par certains professionnels. Il permettrait de diminuer l’importance de l’infection et son expansion. Des décoctions d’ail auraient également une certaine efficacité.
Des essais de traitement avec divers biopesticides (bactéries autres telles que Pseudomonas fluorescens ou P. putida et Bacillus subtilis) ont été effectués, mais ils n’ont pour l’instant abouti à aucun traitement homologué.